ERNEST ET SIFFLOTIN FONT DU CAMPING
Ernest et Sifflotin se sentaient fatigués
Par leurs toutes récentes mésaventures.
Et malgré les soins qui leur furent prodigués,
Leur moral restait en mauvaise posture.
Ils prirent alors une sage décision:
Aller s'isoler un peu dans la nature.
Pour une fois, pas de dangers à l'horizon;
Tout bien calculé, pas de demi-mesure!
Ils décidèrent donc qu'ils pourraient bien camper
Dans un site très calme, tout près de chez eux.
Sifflotin connaissait un endroit adapté,
Et pour ce qu'ils cherchaient, c'était vraiment le mieux!
Les voilà donc partis avec leurs sacs à dos,
Marchant doucement à travers la campagne.
Ils allaient enfin profiter d'un vrai repos
Après l'océan, la ville et la montagne!
Et quelques jours plus tard, au détour d'un chemin,
Un superbe lieu, une jolie clairière,
Attira leur regard dans l'air frais du matin.
Tout à côté serpentait une rivière.
Ce tout petit coin était un vrai Paradis!
Partout, des tapis de fleurs multicolores
Invitaient à la sieste quand, l'après-midi,
Le chaud soleil ne les brûlait pas encore.
Il fallait à présent commencer à monter
La tente qui abriterait leurs doux rêves.
Mais entre la toile, la corde et les piquets,
Quel travail! Pas question de se mettre en grève!
Après s'être affaissé quand même plusieurs fois,
Le frêle abri fut prêt à tenir son rôle.
Et c'est ainsi que l'on vit, au milieu des bois,
Un campement tout bleu. C'était assez drôle!
Ils avaient un peu la sensation d'étouffer!
En fait, la tente s'écroulait par le milieu,
Et leurs têtes se trouvaient ainsi coiffées
De la toile... Fusa un fou-rire nerveux!
La cocasserie de cette situation
Pendant un bout de temps les fit beaucoup rire.
Puis ils reprirent au début l'opération
Qui devait, en principe, tout bien maintenir!
Les piquets, cette fois, furent mieux enfoncés.
Nos compères purent dormir sans problème.
Mais au petit matin, Sifflotin fut coincé
Par la fermeture éclair: nouveau dilemme!
Ernest eût vraiment du mal à le libérer.
Sifflotin y laissa même quelques plumes!
Enfin, ils furent prêts pour aller explorer
Ce décor enchanteur, si loin du bitume.
Tout près, ils découvrirent un joli étang
Où lentement, se promenait un beau cygne.
Ils étaient fascinés par le gros oiseau blanc
Qui, les apercevant, leur fit de grands signes.
Majestueusement, vers eux il s'avança
Et vint les saluer, montant sur la rive.
Parlant de tout, de rien, soudain il annonça:
" Faites attention, une tempête arrive!"
Brusquement, en effet, le ciel devint tout gris.
Ernest et Sifflotin partirent très vite
Dans le seul but de consolider leur abri!
" Merci!" dirent-ils. " Demain, on vous invite!"
Après avoir dîné, ils se couchèrent tôt.
Au-dessus d'eux, la pluie tombait avec rage.
La toile tenait. Ils s'endormirent bientôt,
Pour, à l'aube, sursauter avec l'orage.
Le bruit de la rivière s'était amplifié.
Le sol de leur tente était très humide.
Ils sortirent ensemble afin de vérifier
Si leur équipement restait bien solide.
Ce qu'ils virent alors les cloua de stupeur!
Sorti de son lit, le torrent en colère
N'allait pas tarder à emporter nos campeurs.
Ernest et Sifflotin ne surent que faire!
S'agrippant aux piquets chacun de leur côté,
Vraiment décidés à ne pas lâcher prise,
Ils sentirent pourtant qu'ils allaient déraper,
Entraînés par la force de cette eau grise!
Brutalement, soudain, ils furent propulsés
Droit devant, avec une telle vitesse,
Dans un sens, puis l'autre, affaires renversées,
Criant à tout vent leur immense détresse...
Sifflotin, dont les plumes étaient mouillées
Ne pouvait même plus battre de ses ailes.
Ernest, suffocant, n'arrivait qu'à gargouiller
Des mots incohérents! Quelle fin cruelle...
A demi- inconscients, ils perçurent soudain
Comme une présence qui se rapprochait d'eux.
Presque évanouis, ils n'étaient plus très certains
D'être encore en vie. Rien n'atteignait leurs yeux!
C'est à ce moment qu'ils furent tirés de l'eau,
Arrachés brusquement aux éléments furieux.
Déposés en douceur comme dans un berceau,
Ils se laissèrent choir dans un cocon brumeux...
Leur sauveur n'était autre que le grand oiseau.
Surpris par la violence de la rivière,
Il avait vu passer au milieu des roseaux
Les deux naufragés à l'allure peu fière.
Sans plus réfléchir, il les avait attrapés
Et posés sur son dos, comme sa couvée.
Les conduisant au sec, plus haut, dans la forêt,
Très fier de lui que leurs vies soient sauvées.
A présent en lieu sûr, Ernest et Sifflotin
Revenaient à la vie, sous les yeux du cygne.
Il avait, par bonheur, modifié leurs destins,
Détournant de leur route un sort indigne!
Le danger prend souvent un aspect très sournois.
Il nous trompe sous de belles apparences.
C'est pourquoi nous devons nous méfier chaque fois
Que surgit devant nous la magnificence!